Le Musée d'art et d'histoire de Narbonne
Par SPRA — Dernière modification 15/02/2016 13:39:23
C'est dans l'ancien Palais des Archevêques, au deuxième étage précisément, que sont réunies les collections d'art et d'histoire du Musée éponyme. L'imposant bâtiment, second ensemble d'architecture religieuse de France après le Palais de Papes d'Avignon, abrite aussi l'Hôtel de Ville et le Musée archéologique. L'ensemble mérite en soi une visite tant il est typique de l'architecture romane pour sa partie la plus ancienne (13ème siècle) et gothique pour le Palais dit Neuf (18ème siècle). Le musée est créé en 1833 à l'initiative de Paul Tournal, érudit local, et grâce aux dons de la Commission archéologique. Le projet de création d'un Musée public dans le Palais des Archevêques est pourtant plus ancien puisqu'il date de la Révolution. C'est en effet en 1792 que le peintre Jacques Gamelin propose la création d'un Muséum pour accueillir et présenter à la population "les tableaux et autres objets d'art dispersés en divers lieux lors de la confiscation des biens dits nationaux".
Un bâtiment et des décors exceptionnels
Situé dans les anciens appartements des Archevêques, le Musée permet d'admirer les très beaux décors créés lors des différentes étapes de l'évolution du Palais du 17ème aux grandes restaurations du 19ème siècle. La salle des Audiences par laquelle on commence la visite du Musée présente ainsi un magnifique plafond peint à la française de 1634 et une imposante cheminée décoré de mascarons. Autre pièce remarquable La Chambre du Roi est ainsi nommée car elle accueillit le roi Louis XIII alors en guerre dans le Roussillon. Son plafond à l'italienne composé de 49 caissons peints sur le thème des neuf muses fut réalisé en 1633 par les trois frères Rodière, peintres et doreurs narbonnais. De décors plus récents (18ème et 19ème siècle) mais non moins intéressants la grande galerie, la salle à manger, l'oratoire, le grand salon et les salles orientalistes complètent l'ensemble des pièces consacrées au Musée.
Une belle collection de peintures mais aussi de faïences
La collection de peintures s'étend du 15ème siècle jusqu'au 20ème. Elle présente un panorama intéressant de la peinture classique des différentes écoles : française, italienne, espagnole et flamande. Même si le Musée d'art et d'histoire de Narbonne ne possède pas d'œuvres majeures, il propose un bel ensemble dans lequel se trouvent tout de même quelques perles. On peut donc admirer une Vierge à l'enfant attribué à Tintoret, une Danse de Noce de Pieter Brueghel et un martyr de Sainte Cécile attribué à Raphaël. La collection de faïences vaut aussi d'y consacrer un peu de temps. Elle regroupe un remarquable de faïences de Marseille, Montpellier, Moustiers, Nevers et Rouen.
Le fonds orientaliste, la vraie singularité du Musée de Narbonne
Mais ce qui fait vraiment la singularité du Musée de Narbonne c'est sa collection de peintures orientalistes. Composée de 125 œuvres, elle est la première collection publique de ce genre en France. Très en vogue au 19ème siècle, la peinture orientaliste reflète souvent la vision occidentale de l'Orient à cette époque. Elle est profondément liée aux voyages qui ont inspiré la plupart des peintres orientalistes. La première œuvre de la collection est un tableau de Vincent Courdouan acquise en 1865 intitulée L'embarquement des zouaves pour la Crimée. Par la suite la collection n'a cessé de s'agrandir. Originale par le nombre d'œuvres exposées, la collection orientaliste de Narbonne l'est aussi par les salles d'exposition. Les deux salles représentent l'une une reconstitution d'un palais maghrébin, l'autre de la mosquée de Cordoue. Autant dire que le visiteur est immédiatement mis dans l'ambiance de ces peintures qui évoquent un Orient souvent fantasmé et en tout état de cause largement disparu aujourd'hui. Pour autant, c'est à un vrai voyage dans le temps et l'espace auquel on est convié. Et si certaines œuvres semblent un peu maladroites, il y a aussi des tableaux remarquables comme La Casbah de Jacques Majorelle, la Jeune fille arabe de Jean-Baptiste Carpeaux, Le Harem de Fernand Cormon ou Les toits de Tunis d'Albert Aublet.
Carrefour des cultures méditerranéennes, Narbonne possède un patrimoine riche dont le Palais des Archevêques est évidemment le fleuron. Sa visite est une évidence comme l'est celle de son Musée d'art et d'histoire, petit bijou injustement méconnu ne serait ce que pour cette étonnante collection orientaliste évocatrice de rêve et d'évasion, de voyage et d'aventures.
Bruno Deschamps
